mardi 27 mars 2012

Attachage

Le printemps : mois qui préparent l'été, la nature qui se réveille.
Le vigneron ne peut se perdre dans ses contemplations, il faut attacher !

Oui, mais attacher quoi ? et bien la vigne pardi ! Petit récapitulatif :

On taille la vigne, ne laissant que 2 "branches": l'haste et son retour. On tire les bois afin de dégager le palissage et permettre aux futures pousses de s'épanouir. Il faut ensuite attacher cette haste à un des fils du palissage afin de guider la vigne dans sa pousse. On laisse pousser (il y a bien quelques opérations à ce moment là, je vous les décrirai quand je les aurai vécu !), on canalise le feuillage en "relevant" (description plus tard également, faut bien vous laisser des surprises !), les grappes poussent, le vigneron veille. On ramasse, on vendange. et on retaille et on recommence. Voilà en gros le travail d'une année en viticulture !

Donc nous en sommes à la période de l'attachage. Pour mieux comprendre, quelques images :

On attache afin de guider la plante dans sa pousse. Les branches vont pousser perpendiculairement à l'haste, donc ainsi, à la verticale !


Et pour attacher, il faut évidemment, un certain équipement, et certaines précautions :


le principe est simple : on attrape l'haste, on la force à se plier et on l'accroche !



Vous vous doutez bien que ce n'est pas si facile...
donc, la prochaine leçon portera sur "Quels sont les dangers de l'attachage ?"
La suite, trés prochainement !

mercredi 29 février 2012

"La mise"

Dans le jargon vigneronnesque, "faire une mise" signifie mettre en bouteilles le vin.
Chose faite la semaine dernière.
En quoi cela consiste-t-il ?

Le vin est préparé et stocké dans une cuve. Un collègue débarque avec un camion et une remorque, du type "oh y'a un manège dans la remorque de son camion et quand il va soulever les bâches, on pourra faire du manège"
C'est un peu ça: on monte, on descend de nombreuses fois, sauf qu'on n'est pas porté par une jolie fusée avec des feux clignotants mais par nos jambes, nos bras et nos abdos!

Plusieurs postes sur ce ménage étrange:
1) le poste de poseur de bouteilles vides (on prend les bouteilles bien empilées et on les mets sur un tapis roulant) nécessite une longueur de bras minimum car il faut attraper les bouteilles au fond de la palette sans avoir à se coucher sur les piles de bouteilles inférieures (je sais, ça nécessiterait un schéma mais j'ai pas eu le temps !)
Une fois les bouteilles chargées, elles sont entraînées par le tapis où elles vont être remplies de vin, puis un petit "pschiiit" qui fait le vide d'air dans le reste de la bouteille et hop un bouchon ! tout ça supervisé par le poste 2  qui est tenu par monsieur manège.
3 et 4) 2 personnes à la sortie qui récupèrent les bouteilles ainsi pleines et bouchonnées (environ 1kg chaque bouteille) et les rangent dans un palox (bien alignées, bien collées les unes et autres et empilées soigneusement).

On m'a attribué le poste 3 (zut, si j'avais eu de plus longs bras, j'aurai soulevé moins de poids !)

La mise en chiffres:

à l'entrée : 73 hectolitres de vin (et un hecto correspond à ?... 100 litres !)
à la sortie : 10211 bouteilles (de 75cl et de 50cl)
temps écoulé: 6 heures
soit une bouteille sortant toutes les deux secondes.

Sachant que , pour éviter les embouteillages en fin de chaîne, nous prenons les bouteilles 4 par 4 (oui, oui, deux dans chaque main, habilement coincées entre les doigts, gare à la casse !),
mes doigts ont donc supporté à chaque fois 2 kilos dans chaque main (et je peux vous dire que plus ça avance, plus ces deux kilos vous paraissent lourds et vos doigts sont douloureux)

En partant du principe que j'ai rangé la moitié des bouteilles en sortie, soit environ 5100 bouteilles et que je les prenais 4 par 4, cela engendre :
1275 pivots avec le bassin (je récupère les bouteilles et me tourne d'un quart de tour pour accéder au palox)
1275 "je monte sur une marche car le palox est trop loin" (toujours la cuisse droite qui travaille... je vais avoir l'air difforme !)
1275 je me plie le dos pour déposer les bouteilles au fond du palox.


Bref, mes doigts ont supporté 5 tonnes en 6 heures, j'ai fait ma gym avec 1275 abdos.
Je vais avoir une cuisse musclée (et pas l'autre), des doigts super forts (très utile me direz vous), et un mal de dos pendant plusieurs jours !

Mais heureusement, pour garder les muscles chauds et travailler les épaules, bras et cuisses (les deux) avant l'été, il me reste plein de bois à tirer !

Ah, le métier de vigneron... un sport complet !

samedi 25 février 2012

Aujourd'hui, j'ai fait ma première dégustation dans un restau !

Aujourd'hui est à marquer d'une pierre blanche (1). J'avais rendez vous dans un restaurant afin de faire déguster au nouveau patron nos vins.

8h: prise de mes fonctions au bureau, je suis zen, étonnamment, je fais la liste de ce dont je vais avoir besoin et réunis donc tire bouchon, 3 bouteilles finement choisies avec mon guide, mon porte-vue avec tous les papiers éventuellement nécessaires (tarifs de livraison, description des cuvées, carte de visite, calculatrice, etc...). hummm, je crois que j'ai tout.

8h40 : je suis en train de relire les fiches descriptives des 3 vins que j'apporte, question de retenir avec quels cépages ils ont été faits et deux, trois détails techniques.

8h43 : coup de téléphone de mon guide pour me dire de ne pas stresser, que tout va bien se passer, qu'il faut que je sois moi même et que je parle du vin avec mon feeling habituel et mon empathie naturelle et que je laisse parler le restaurateur.

8h44 : je note les conseils, mais suis toujours confiante: le restau prenait déjà de notre vin, je contacte juste le nouveau propriétaire pour voir si ça l'intéresse de poursuivre avec nous. Je ne saurai dire pourquoi mais ce fait là me rassure et me donne confiance, comme si le terrain était déjà connu.

8h46 : re-tel : toujours mon guide pour me dire qu'un client (faisant partie de la famille et lecteur assidu de ce blog, coucou mister M. !) passera vers 10h chercher une commande. OK, ... enfin non, parce que moi, à 10h15, je dois partir pour mon rdv.

8h48 : je rappelle mister M. pour lui dire de passer un peu avant. Tout est bon.

8h49 : je mets à jour nos plaquettes car on a mis en bouteille une nouvelle cuvée

9h18: je change les cartouches d'encre de l'imprimante afin de pouvoir imprimer les dites plaquettes.

9h23 (les mains de toutes les couleurs), re-tel : c'est mon guide qui me dit que ca va aller, que je ne dois pas stresser, que je vais y arriver, etc, etc...

9h25: MAINTENANT JE STRESSE ! (c'est malin, ça)

Ensuite mister M passe prendre sa commande, papoti papota qui me change un peu les idées et à 10h (un peu en avance), je suis assise dans mon camion prête à affronter (euh, rencontrer) le restaurateur.
J'ai environ 45 minutes de route, j'arrive un peu en avance et me prend un café dans une brasserie toute proche. Tout va bien.

11h : l'entretien commence.
Il commence par me dire qu'il a un ami vigneron dans une autre appellation et qu'il va faire affaire avec lui (oups, ça commence mal), je ne me laisse pas déstabilisée et lui parle de notre domaine, des trois vins que je lui ai amené... Première question de sa part "que commandait mon prédécesseur ? " (mince ! le détail bête que je n'ai pas pensé à regarder , quelle idiote !) Je repense alors à la phrase de mon guide "sois naturelle" et là, je dis au client "écoutez , je vais être honnête avec vous, vous êtes mon premier restaurateur pour une dégustation, parce qu'en a fait, ça ne fait pas longtemps que je suis dans le métier blabla blablabla ..." attention, je ne lui ai pas raconté ma vie, c'était un échange intéressant !
En tous cas, je ne sais pas si ça a sensibilisé la serveuse ou si c'était juste du professionnalisme, mais elle a commencé à se manifester par des "ce vin, les clients nous le réclament, on l'a plus depuis quelques semaines, et celui là aussi et en rosé aussi", ok, deux, trois phrases bien placées (merci de votre soutien madame la serveuse même si ce n'était pas volontaire)
11h40: je pars du restaurant, une commande de 150 bouteilles dans mon sac, et en plus, faut que je farfouille au vignoble s'il n'y a pas des photos qui trainent car il refait la déco.

11h42: je suis dans mon camion, le sourire aux lèvres et pas peu fière de cette première dégustation .
Je reste consciente que même dans le commerce, c'est peut être la chance du débutant ! Nous verrons bien combien de temps cette "chance" me tient !







1. marquer d'une pierre blanche, d'où ça vient ?
En France, sous l'Empire, la participation au service militaire pouvait être volontaire ou tirée au sort. Ainsi, le futur soldat plongeait la main dans un sac rempli de cailloux noirs et blancs. Si la pierre retirée était noire, il devait alors partir au combat, ou bien payer un autre homme moins riche que lui pour qu'il le remplace. Si à l'inverse la pierre était blanche, alors il était exempté de service militaire. Il pouvait donc se souvenir longtemps de ce jour heureux où le caillou blanc lui avait évité la mort. Depuis, on utilise cette expression lorsque l'on souhaite figurer que l'on se souviendra longtemps d'un événement important à nos yeux.

jeudi 23 février 2012

En formation...

Ces jours ci, je participe à une formation visant à se regrouper afin de mettre en avant les spécificités de notre terroir et de notre AOC.
Cette formation part du travail du sol jusqu'au calcul de prix de revient d'une bouteille. Donc trés intéressant pour quelqu'un qui débute comme moi. Sauf que...la plupart des autres participants sont des vignerons depuis beaucoup, beaucoup, beaucoup plus longtemps que moi et que les questions sont hyper pointues. Mais je ne désespère pas et prends ce que je peux prendre.
Derniers jours de formation en date : étude des sols, podologie, géologie. Waouh, rien que ça. Bon, moi, aller renifler la terre et creuser des trous, ça me plait bien mais l'aborder de manière théorique... comment dire... il renait en moi une espèce d'allergie aux termes physiques/chimie ... Phosphore, calcium, tout ça symbolisé au tableau par leur lettre référence..."NPK vous dis-je ! NPK !!!" Argh, j'ai peur...
et comme tout cancre réfractaire à certaines données, je me suis mise à griffoner sur un coin de table.
Voici quelques morceaux choisis:

AVERTISSEMENT: Ces dessins ne sont pas forcément le reflet de ce qui a été dit lors de la formation, mais simplement le fruit de mon interprétation, mon extrapolation, mon imagination (mais au départ, y'a toujours un mot de vrai !)











Allez, courage... prochaine étape "le marketing appliqué" ... comme si je ne m'appliquais pas, pfffft !

mardi 14 février 2012

Tirer les bois...

Lorsque la vigne est taillée, il reste encore à "tirer les bois", c'est à dire qu'on va enlever les branches de la vigne restées accrochées, emmêlées, empêtrées dans les fils de fer du palissage. Et la vigne, c'est comme une lianne, ça s'accroche bien.

Explication en images:




lundi 13 février 2012

Devenir négociant en vin

Devenir négociant... jusque là, rien de compliqué: cela  consiste à pouvoir acheter du vin chez un collègue par exemple et le revendre.
Sauf que... pour avoir ce statut légal, il faut passer par l'étape "déclaration aux douanes" et oui, on ne joue pas avec les produits alcoolisés comme ça !
heureusement, notre douanier est quelqu'un de fort sympathique: laissez moi vous conter notre rencontre...

Un matin, vers 10h ...

Le douanier, très dévoué, prit sa tache très à coeur...


Et près d'une heure plus tard...


Vu que je ne maîtrise pas tout le champ lexical du droit douanier, j'ai préféré tout bien noté !



Résultat: j'ai passé 2 jours et demis sur Excell à créer de magnifiques tableaux avec des formules de calcul automatiques et des colonnes qui se reportent automatiquement d'une page à l'autre ! Waouh, j'suis trop fière !

Février... l'hiver (enfin !)

Qu'il est loin le temps où j'écrivais tous les soirs... Toutes mes excuses à ce sujet; ce n'est pas que je n'ai plus rien à dire... nooooonnnnnnnn, loin de là, j'y pense souvent pendant ma journée de travail "tiens, ça, ça ferait un bon post pour le blog" mais le soir arrivant, la nuit tombant... pffffiout, ma motivation s'envole quelque peu et puis un jour, un commentaire tombe, une personne me parle de mon blog et hop, la motivation de bien vouloir prendre le temps d'ecrire rejaillit !
J'ai quelques croquis à disposition que je posterai dès demain, dont je vous garde la surprise du sujet.

Mais revenons à nos vignes. L'hiver s'est enfin installé ! youpi ! En tant que nouvelle femme de la campagne, je commence à vivre en harmonie avec les végétaux qui m'entourent. Et non, des bourgeons en plein mois de janvier avec 15 ° de température extérieur, 1) ce n'est pas "normal" 2) Ce n'est pas bon pour les plantes, qui sautent leur cycle de sommeil 3) c'est encore plus terrible si la sève monte dans la plante et qu'il gèle par la suite ("rappelez vous l'hiver 54 -non, peux pas j'étais pas née- il a gelé trés tard et trés durement et les pruniers avaient éclatés !" dit mon voisin agriculteur), alors moi, je le crois parce que je suis en pleine phase d'apprentissage et je n'essaie même pas de rivaliser avec les savoirs ancestraux de ces gens qui savent observer la nature et qui vous sortent des dictons à tire larigot* (au début on sourit poliment, après on s'y intéresse pleinement car la plupart s'avère vrai ! "S'il gèle à la Saint Raymond, l'hiver est encore long" (oups, c'est quand la saint Raymond ???)
Donc, après un très doux mois de janvier, voici Février et sa grande chute de neige (et des températures !). Difficile d'atteindre le vignoble et une fois qu'on y est, difficile d'en repartir (un peu comme l'éducation nationale en fait !). La neige bloque la plupart des routes, mais bon, un peu comme chaque année où ça fond au bout de deux jours... sauf que là, Raymond il a bien dit "comme l'hiver 54" et ça fait une semaine et la neige est toujours bien là. Vivent les feux de cheminée et les bonshommes de neige !

La vie au vignoble s'en est trouvée ralentie, se laissant bercée par le doux calme blanc. Seuls les oiseaux viennent nous rendre visite (et un livreur un peu aventureux apparemment). Douce quiétude des temps neigeux. Le froid accompagné de vent est bien vivifiant quant à lui. Et dans cette contemplation de la nature en sommeil on n'en oublierait presque que cette justement cette semaine qu'on devait mettre en bouteille la cuvée 2011 et que le camion ne pourra jamais descendre le chemin qui mène à l'entrée du chai, que j'avais prévu de l'étiquetage pour préparer la saison des salons qui recommence (oui, mais là, rester dans le chai où il fait proche de zéro à attraper des bouteilles gelées à mains nues (parce qu'avec les gants, ça glisse !)... non, désolée je peux pas. Ce n'est pas faire ma chochotte, c'est que... "faut savoir préserver son outil de travail" dit mon guide (et cet outil, c'est moi !)... donc, pas de risque inutile de rhume, grippe, gelure ou autre glissade sur une plaque de verglas: restons au bureau, bien au chaud !
Préparer les salons: réserver un hotel pour le vigneron, repérer nos clients des années passées et leur préparer un joli courrier pour leur annoncer notre venue, y joindre une invitation éventuellement... tout ça, écrit par mes soins, imprimé sous mes ordres par une imprimante qui bouffe plus d'encre d'une troupe entière d'écoliers avec leur bic, soigneusement plié (merci mon fils de 12 ans qui m'a montré une technique allant 6 fois plus vite que la mienne), délicatement introduit dans une enveloppe, cacheté et enfin timbré (à la main , s'il vous plait !)
Alors, messieurs, dames, s'il vous plait, quand vous recevez un courrier, même commercial, dites vous bien que (si c'est une petite structure), quelqu'un est derrière ce courrier, qu'il y a passé du temps, a hésité peut être longuement sur chaque phrase qu'il allait y mettre....merci de le lire, juste une fois... question de me dire que je ne fais pas ça pour rien !





Avant de se quitter, travaillons l'étude de la langue, tout en se cultivant:

*Tire larigot : Expression née dès la fin du XVe siècle de l’association du verbe "tirer" (sortir un liquide de son contenant), et du nom "larigot", sorte de petite flûte, cette expression était à l’époque principalement associée au verbe "boire". "Boire à tire larigot" était donc pour les buveurs une incitation à faire sortir le vin des bouteilles comme on faisait sortir le son de l’instrument. (y a-t-il un lien avec l'expression pour désigner quelqu'un qui boit en disant de lui qu'il "flûte" ?)

Et quelques dictons "meteo":
-Neige et vent à la Chandeleur, printemps proche (ouf, nous voilà sauvés !)
- Avril venteux rend le laboureur joyeux 
-Brouillard de Mai, chaleur de Juin, amènent la moisson à point. 
-Le vent du jour de l'an souffle moitié de l'an  
etc, etc, etc... 

jeudi 12 janvier 2012

La routine... pleine de surprises !

Certaines journées commencent à se ressembler. J'ai encore pleinement le plaisir de la découverte de certaines taches, principalement le travail à la vigne suivant les saisons, même si ce n'est pas là que j'interviens le plus (dommage, j'aime bien mettre mes nouvelles bottes vertes pomme, rembourrées chaudement à l'intérieur -merci Maman !-)
Je redécouvre la nature sous un autre angle, avec plus d'attention. Aujourd'hui, le vignoble s'est réveillé dans le brouillard, il n'y est pas resté trop longtemps et nous avons la chance ici (car ce n'est pas du tout le cas à 5 kms d'ici , incroyable !) de voir le soleil pointer ses rayons assez vite.
Avec cette brume, notre ouïe est décuplée. Le moindre chant d'oiseau est amplifié, les gouttelettes tombant des branches après le dégel chantent un doux clapotis. Nos poules réclament qu'on leur donne leur liberté diurne. Et vous savez ce qui m'a le plus surpris ? C'est d'apprécier tout cela. Ce silence bruyant de campagne pouvait me paraitre angoissant fut un temps, mais pas là... il m'apaise. J'ai eu une pensée pour les collègues, au chaud, dans leur classe... Je me suis remémorée les cris d'enfants pendant la récréation, le bruit des règles métalliques qui tombent du bureau, les chaises qu'on traine au lieu de les soulever, les chuchotements dès qu'on a le dos tourné. Ces sons là ne me manquent pas. Je les ai entendu suffisamment pour les garder dans ma bibliothèque sonore personnelle. Ils me vont bien ainsi.

Après cette pause contemplative, je me suis remise à mon bureau: faire le tour des mails, adapter son programme de la journée si besoin. Tout va bien. Tout est calme. Je m'attèle à ma tache du jour, à savoir " entrer des données informatives sur le vignoble sur un site de vente en ligne de produits bio" dont nous sommes à présent les partenaires. Lorsque que SOUDAIN (d'où le titre de ce message) le téléphone sonne! (si, si!) . C'est un caviste que nous avions démarché lors d'un des salons d'automne. Il a aimé notre vin, il l'a fait gouter à un autre caviste qui a aimé aussi et ils veulent en commander...plein ! hourra ! youpi ! Qu'il est bon de voir que notre travail paye. Tellement de coup de fil, de suivi qui n'aboutissent jamais ! C'est donc avec une certaine fierté que nous recevons ces demandes et ça fait réellement du bien au moral. J'ai beau savoir que seulement 10% des démarchages aboutissent à un rdv, et encore moins à une vente, je n'apprecie toujours pas les histoires stagnantes... une sensation d'avoir perdu son temps.. mais ça, on ne peut jamais le savoir à l'avance !
Donc, je prends note de la commande. Regard dans les stocks: c'est bon, on a ce qu'il faut ! Je me fais un pense bête pour préparer la commande le lendemain , parce que quand même, j'ai bien envie de finir de compléter ce site en ligne (toute emplie que je suis de cette fierté enivrante).
Lorsque soudain, le téléphone ressonne. Et recommande du même vin. Ah, cette fois ci, ça commence à être juste... Quitte à le faire, autant aller au bout: je me décide à appeler d'autres restaurateurs qui apprécient ce vin et bingo ils décident d'en prendre aussi. Et hop, voilà mon programme de la journée qui prend un tout autre virage... direction le chai et mon amie l'étiqueteuse !

Résultat de la journée:
fierté professionnelle: 1
moment de plénitude sonore: 1
bouteilles étiquetées dans le chai où il fait un peu frais: 192
bouteilles lavées (car c'est un vieux millésime qui a pris la poussière) : 54

L'avantage, c'est que je sais tout de suite ce que je vais faire demain matin: aller au chai, donner un dernier coup de chiffon sur les bouteilles que j'ai lavées afin d'en ôter toute trace rebelle, et finir de mettre en carton cette cuvée afin que des gens des quatre coins de la France puissent sourire en partageant cette bouteille.
Ah, c'est un beau métier que je fais là !

lundi 9 janvier 2012

Janvier.

Comme un mois d'hiver où il ne ferait pas assez froid selon la plupart des agriculteurs du coin, comme un mois de janvier où certains arbres bourgeonnent... Quand on est citadins, on aime le soleil, quand on devient paysan, on sait apprécier la pluie...
Nous allons partir du principe que je me sens encore un peu citadine dans l'âme, même si j'apprends et aime observer la nature au fil des saisons.

Ici, tout pourrait paraitre calme: les vinifications sont terminées, les prochains millésimes attendent sagement de pouvoir sortir sous l'oeil avisé du mon guide. Naissance prévue en février !

La vigne s'endort, ses feuilles sont tombées au sol. Le vigneron va passer voir chaque pied, l'observer, le choyer et choisir méthodiquement quels sarments il laissera pour l'année prochaine afin de limiter la croissance démesurée de la vigne et ainsi régulariser la production des raisins en qualité et en quantité. C'est un choix délicat et une opération dont je n'ai pas voulu assumer la responsabilité pour cette année !
Pour ceux qui veulent plus de détails, c'est par ici :  http://fr.wikipedia.org/wiki/Taille_de_la_vigne


Je choisis donc l'option un peu moins délicate, même si chaque opération sur la vigne demande de l'attention. Pour moi, cette année ce sera tirage des bois ( à défaut des rois !). En quoi cela consiste-t-il ?

Eh bien, c'est simple :
Une fois que la vigne est taillée, il faut passer derrière chaque pied et tirer sur les sarments enchevêtrés dans les fils de fer (cf le chapitre sur le palissage).
Mais pourquoi ne pas les laisser tomber tous seuls me direz-vous ?
Tout simplement car les vrilles de la vigne les tiennent solidement attachés aux fils de fer et que si nous ne les retirions pas, ils mettraient plusieurs années à se dégrader. Au printemps, ils viendraient se mêler aux jeunes pousses et seraient gênants au milieu des jeunes branches,  feuilles et raisins.
Les vignerons n'ont donc pas d'autre choix que de les faire tomber. C'est un travail particulièrement éprouvant car la vigne est une liane qui a la propriété de se fixer solidement sur tous les supports avec lesquels elle est en contact lors de sa croissance. Nous devons donc tirer, tirer, tirer encore afin de les extraire du rang.
Au fur et à mesure, il faut les déposer au sol, au milieu du rang, ils seront ensuite broyés. Cette méthode présente un grand intérêt agronomique car les bois de la vigne restituent au sol tous les éléments qu'ils contiennent et qui ont été puisés durant la période végétative, que se soient des éléments minéraux ou encore la matière organique. C'est une méthode naturelle permettant de ne pas trop appauvrir les sols et ainsi de limiter les apports d'engrais ou encore d'amendements organiques.
Mon guide me met en garde: comme d'habitude, vigneron est un métier périlleux ( entendez vous la petite musique angoissante qui monte ?)
Les seuls dangers ici étant 1) se crever un oeil en prenant un retour de sarment dans la figure et 2) tirer sur la mauvaise branche et amputer le cep du sarment qui devait porter ses fruits au printemps prochain .
Je considère que les dangers sont aisément évitables et me sens capable de réussir cette nouvelle tâche.

Allez hop, c'est parti : Gnnnnneu.... outch..... pffiiiiiiouuut... je m'éssoufle vite à tirer sur des branches résistantes, on imagine pas comme elles s'accrochent et sont costauds. Mais je ne cèderai pas , non, non !
Je tire, prends appui, essaie de trouver la position où mon corps aura le moins d'effort à faire (on se plie facilement en deux dans toutes ces taches et le corps étant notre outil principal, il faut le préserver au maximum -quand on peut-)
Un demi rang plus tard, j'ai chaud et je me sens bien: forcer comme une ânesse défoule assez bien en fait et j'ai apprécié cette tache "bourrine" qui me sort du commercial ...

Quelle est la météo pour demain ? Averses ? ... hum, je crois que j'ai des commandes à préparer, je retournerai dans les vignes dès que le soleil reviendra ! (c'est pas de ma faute, j'ai des origines niçoises, ce qui veut dire un gros besoin de soleil pour un développement serein et une certaine aversion pour la pluie !)